Messianisme et sainteté : les poèmes du mystique ottoman Niyâzî Misrî, 1618-1694

Ce que dit l'éditeur

Messianisme et Sainteté

Les poèmes du mystique ottoman Niyâzî Misrî

La mystique de langue turque dans l'empire ottoman est encore mal connue parce que peu abordée par les spécialistes qui ont longtemps ignoré cette longue période qui couvre environ six siècles de l'histoire du monde musulman. Deux préjugés tenaces issus de la rhétorique politique moderne au Proche-Orient sont à l'origine de cette négligence. Le premier considère que les Turcs sont responsables de la décadence du monde arabe, et le second que la culture du Proche-Orient aurait été victime d'un long déclin qui l'aurait conduite jusqu'à l'extinction. Il suffit de se pencher sur l'histoire de la pensée dans l'empire ottoman pour comprendre que ces deux préjugés ne sont pas tenables, d'une part parce que leur fondement politique n'est pas valide en l'occurrence, d'autre part parce que l'empire ottoman était le lieu d'un intense débat intellectuel. Niyâzî Misrî en est l'une des figures les plus originales et les plus intéressantes. Il est l'héritier de la tradition mystique ottomane qui elle-même reprend et enrichit singulièrement les traits de la mystique persane et arabe. Mais d'un autre côté, il a depuis son enfance été en permanence en révolte contre les systèmes, qu'ils soient politique, clérical ou confrérique. D'un côté, il s'attaque frontalement à la dynastie qui dirige l'empire. D'un autre côté il subvertit l'enseignement mystique en en poussant la logique jusqu'à ses extrémités à partir des figures fondatrices que sont pour lui Hallâj et ibn al-'Arabî. Il articule la politique et la mystique sur la question du mal pour éviter de compromettre la spiritualité. Il est enfin l'auteur de l'un des recueils de poèmes mystiques les plus connus et les plus pratiqués dans les couvents de derviches.